Auteur:
Nadine Saint-Pol et Pauline Windels, Corporate Consultants chez Group Casier, n.saint-pol@casier.be et p.windels@casier.be
« Le passeport numérique des produits (DDP) est un outil puissant pour sensibiliser les consommateurs »
« Le passeport numérique des produits (DDP) est un outil puissant pour sensibiliser les consommateurs »
Connu pour son luxe abordable et son design intemporel, Xandres prend des mesures importantes en faveur d’un avenir plus durable. Clio Gydé, Sustainability Manager chez Xandres, donne un aperçu des défis auxquels l’entreprise de mode belge est confrontée pour réaliser la transition circulaire au sein de l’industrie textile. « L’innovation, la transparence et la collaboration sont essentielles pour faire avancer les choses. »
Connu pour son luxe abordable et son design intemporel, Xandres prend des mesures importantes en faveur d’un avenir plus durable. Clio Gydé, Sustainability Manager chez Xandres, donne un aperçu des défis auxquels l’entreprise de mode belge est confrontée pour réaliser la transition circulaire au sein de l’industrie textile. « L’innovation, la transparence et la collaboration sont essentielles pour faire avancer les choses. »
Clio Gydé : « Xandres existe depuis 55 ans, ce qui signifie que notre modèle d’entreprise repose historiquement sur un modèle linéaire. Nous ne prétendons donc pas être, à l’origine, une marque de mode axée sur la durabilité. Néanmoins, nous pensons qu’il est essentiel de progresser pas à pas dans cette direction. Je travaille chez Xandres depuis plus d’un an en tant que Sustainability Manager à temps plein. Pour une entreprise de 120 employés, dont 60 collaborateurs en magasin, cela montre la priorité accordée à la durabilité dans notre entreprise. En effet, les projets durables nécessitent des ressources importantes ainsi que du temps. Heureusement, les projets de subvention offrent des possibilités d’innover sans avoir à supporter seul tous les risques financiers en tant que PME. »
« Notre approche repose sur six piliers : matières, modèle, production, l’empreinte carbone, repair and care et Xandres Lab. Ce faisant, nous examinons l’ensemble de la chaîne de valeur, à la fois pour apporter des améliorations et pour réduire notre impact négatif. La durabilité est présente à chaque étape de notre processus de production, depuis la sélection des fils et des tissus jusqu’à la garantie que votre vêtement résistera à l’épreuve du temps après l’achat. »
« J’aime l’appeler notre “terrain de jeu”. Nous y expérimentons des modèles commerciaux circulaires à plus petite échelle, sans compromettre la continuité de nos activités. Le mot “Lab” renvoie à la fois à “laboratory”, pour l’aspect expérimental, et à “collab”, pour souligner l’importance de la collaboration. La circularité ne s’obtient pas toute seule. Vous avez besoin de la chaîne complète. Les projets externes créent une sorte de communauté d’entreprises partageant les mêmes idées. Nous mettons moins l’accent sur le produit en lui-même que sur la vision globale de l’entreprise en matière de durabilité. La collaboration, même entre concurrents, est essentielle pour faire avancer les choses. »
« Infinitex, SCIRT, Just Fashion et Design for Details sont des exemples. Infinitex, financé par VLAIO, s’intéresse aux modèles commerciaux circulaires pour l’industrie de la mode, en se concentrant principalement sur la revente et la réparation. SCIRT (System Circularity and Innovative Recycling of Textiles) est un projet Horizon de l’UE sur le recyclage de textile à textile. Just Fashion s’efforce de mettre en place un système de mode plus équitable. Design for Details est un projet que nous avons soumis avec HOGENT, Flanders DC et Love Tomorrow (Tomorrowland) dans le cadre de l’appel « Design 4 Circularity » de Vlaanderen Circulair. Il se concentre sur la promotion de modèles d’entreprise circulaires par le biais de l’éco-conception. Le projet vise à atteindre cet objectif en élaborant une matrice de décision pour le secteur de la mode et des accessoires, qui aidera les entreprises à évaluer les articles de mercerie fonctionnels et décoratifs (tels que les boutons, les fermetures éclair, les bandes et les paillettes) et à choisir les options les plus respectueuses de l’environnement. Les matières de base des accessoires (tels que le PU et le cuir) sont également étudiées. Bien souvent, notre véritable objectif n’est pas le résultat en soi, mais les leçons apprises en chemin. Dans le cadre du projet SCIRT, par exemple, nous avons constaté qu’une innovation que nous souhaitons mettre en œuvre pour rendre notre production plus durable pose problème à un autre partenaire de la chaîne de valeur. Cela a permis à tous les participants de prendre conscience qu’il n’est pas toujours possible de tout réaliser, ou du moins, pas à l’heure actuelle. En parcourant le processus avec toutes les parties, nous savons où se situent les points névralgiques dans l’ensemble de la chaîne de valeur. En soi, il s’agit d’un résultat important sur lequel nous pouvons nous appuyer. »
« Oui. Dans le cadre du projet Infinitex, nous avons effectué un test avec une collection de revente dans nos magasins de Gand et de Bruges. Pour ce faire, nous avons collaboré avec Thomas More et des partenaires tels que Filou & Friends, Supergoods, Atelier Noterman et Dressr. Le projet d’essai nous a permis de réunir des informations intéressantes sur lesquelles nous continuerons à travailler. »
« Pour moi, la circularité dans le secteur textile rime avant tout synonyme avec longévité. La production de mode a un impact environnemental et social important, même pour les articles à bas prix. Même si la qualité est faible, la main-d’œuvre et les matières sont utilisées de manière intensive - un coût réel rarement répercuté sur le consommateur. C’est pourquoi la circularité ne se résume pas à la qualité du produit, mais repose surtout sur sa durée de vie : combien de temps un vêtement peut-il rester en circulation ? Il s’agit d’un principe fondamental chez Xandres. Aujourd’hui, nous produisons et consommons globalement beaucoup trop, et nous considérons les vêtements comme des produits jetables. Même les magasins de seconde main sont obligés de détruire des articles encore en bon état, simplement parce qu’ils n’arrivent plus à absorber les volumes. »
« Le recyclage est souvent considéré comme la solution, mais aujourd’hui, à peine 1 % des textiles sont effectivement recyclés en textiles. Et lorsque la qualité des vêtements diminue, les possibilités de recyclage s’en trouvent également réduites. Le recyclage n’est donc qu’un élément de la solution, même s’il est important. »
« En redonnant de la valeur aux textiles. Cela peut paraître simple, mais c’est en réalité un défi complexe. Il s’agit non seulement d’améliorer la qualité des vêtements, mais aussi d’encourager leur port sur une plus longue durée. Car un vêtement en parfait état qui finit à la décharge reste un déchet. L’industrie et les autorités ont un rôle éducatif et réglementaire à jouer dans ce domaine. »
« Le passeport numérique des produits (DPP) est une initiative importante de l’UE. Ce passeport informe les clients sur l’origine, l’entretien et les options de fin de vie d’un produit. Ainsi, nous rendons tangibles et concrets des objectifs abstraits en matière de durabilité. Le DPP aide les consommateurs à comprendre d’où vient une pièce et comment l’utiliser plus longtemps. Pensez aux conseils d’entretien, aux options de récupération ou aux canaux de revente que nous partageons déjà aujourd’hui, mais qui sont plus difficiles à faire connaître au client. De cette manière, nous réduisons les risques de voir les vêtements jetés prématurément. Pour moi, le DPP va bien au-delà de la conformité : c’est un outil puissant pour sensibiliser les consommateurs - même si, bien sûr, cela a un coût. »
« En les amenant à réfléchir à leurs habitudes. Depuis plusieurs années, nous organisons le Green Friday et fermons nos magasins à l’occasion du Black Friday. C’est un geste fort, surtout pour une journée qui génère habituellement les meilleures ventes. Et ça marque les esprits. Mais en parallèle, il est important d’arrêter de culpabiliser les gens. Nous n’avons pas besoin de 10 % de personnes irréprochables en matière de durabilité, mais de 90 % qui s’y engagent imparfaitement. L’enjeu, c’est de motiver, pas de juger. Laissez chacun avancer à sa manière, même de façon maladroite - l’essentiel, c’est de faire quelque chose. C’est cela le vrai changement. »
« C’est une possibilité. Par exemple, nous avons récemment remplacé le transport aérien par le transport maritime et ferroviaire afin de réduire notre empreinte carbone. Cependant, les tensions géopolitiques actuelles exercent une pression sur les délais de livraison. Si nécessaire, nous reconsidérerons temporairement le transport aérien pour les envois les plus urgents, jusqu’à un maximum de 5 % de nos transports. Les tensions géopolitiques pourraient également affecter la législation européenne en matière de durabilité, ce qui représente une source d’inquiétude pour notre entreprise et pour tous les entrepreneurs. Nous ne sommes en effet pas isolés du monde. »
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